COURS N°3 : LE DD …UNE PANACEE ?

Publié le par bouchareb

 

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                                      Ph. A.Bouchareb dec.2006


Le développement durable, la belle trouvaille !

 

Il fallait trouver une formule qui aura l’avantage de mettre beaucoup de monde d’accord. Inutile de cacher que cette formule accompagna de près la mondialisation et la globalisation. C’est dire qu’elle reste du ressort du plus fort politiquement et économiquement.

 

Il a fallu attendre les années 70 pour que la      théorie de Malthus (élaborée au XVIII e S.) soit d’actualité. Rappelons que cet économiste anglais,             alertait son entourage sur l’importance de la  relation qui devrait être maintenue entre les ressources et la démographie.

 

Le discours catastrophiste des années 60, a     fait réfléchir le Club de Rome. En effet, adoptant le rapport Meadows, en 1971 (intitulé « halte à la croissance » ), élaboré par des chercheurs du MIT en 1968 (avec comme concept principal, « croissance zéro »), cette prise en main, annonça un intérêt particulier pour des études prospectives sur le devenir de la planète.           

 

En 1972, Le Sommet de la Terre à Stockholm, dessina une esquisse du développement durable sous l’intitulé d’«écodeveloppement ». 

Ce dernier s’appuyait sur :

·        Une recherche des modes de développement, basée sur les contextes politiques  locaux, historiques, géographiques, socioculturels et techniques ;

·        Une équité dans la prise en charge des besoins de tous les hommes ;

·        Des attitudes de précaution vis-à-vis l’écologie.

 

CETTE ESQUISSE A ETE PUREMENT ET SIMPLEMENT CENSUREE EN 1974 PAR LE SECRETAIRE D’ETAT AMERICAIN DES AFFAIRES ETRANGERES, H.KESSINGER.

 

Les griefs :   L’état de développement  des pays du sud  mettait à nu les problèmes environnementaux, qui sont en majorité des conséquences de la croissance économique des pays du nord. Ces derniers ont non seulement « pollué » leur environnement, ils ont transféré ces « méfaits » aux pays du sud. D’autres parts, il est donc loisible de voir dans cette « proposition » d’écodeveloppement, une sorte d’autonomie politique, sociale et culturelle des pays du sud. Point de marchés, point de lieux d’enfouissement…

 

Le terme « écodeveloppement » est lancé par les organisateurs de la Conférence de

Stockholm après que celle-ci ait vu une opposition frontale entre les pays du Nord et ceux du

Sud, afin que ces derniers, tout à leur objectif de développement, se préoccupent aussi de

questions environnementales.

 

L’écodéveloppement est un précurseur et, en même temps, un concurrent de l’expression de développement soutenable, laquelle apparaîtra au début des années 1980. Ignacy Sachs est l’économiste qui a attaché son nom à cette doctrine, conçue au départ pour répondre à la dynamique particulière des économies rurales du Tiers Monde, qui s’est peu à peu élargie pour devenir une philosophie générale du développement.

 

La croissance en tant que telle n’est pas rejetée, mais elle doit être mise au service du

progrès social et de la gestion raisonnable des ressources et des milieux naturels ; une sorte de « voie moyenne, écrit I.Sachs (1993), à égale distance des propositions extrêmes des Malthusiens –entendons le diagnostic établi par le rapport Meadows – et des chantres de l’abondance illimitée de la nature ».

S’inscrivant dans la perspective ouverte par les théories du développement endogène, il importe que chaque communauté définisse par elle-même son propre « style de développement », via notamment un choix de « techniques appropriées », compatible avec son contexte culturel, institutionnel et écologique.

 

La nécessité du développement est réaffirmée, mais cet objectif doit se décliner dans une pluralité de trajectoires et une diversité de modèles d’économie mixte. Il s’agit, déclare I.Sachs (2003) « de renouer avec le débat des années 1950-1960, et de revenir, au moins en partie, à la base du capitalisme réformé que nous avons connu au cours des Trente Glorieuses.

 

Né au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, ce capitalisme réformé était fondé sur trois idées : le plein emploi comme objectif central, l’Etat protecteur et la planification. Je pense que ces trois idées ont encore beaucoup à donner, non pas en revenant en arrière, mais en renouant avec elles, et en les corrigeant à la lumière des expériences vécues et des immenses transformations qu’a connues le monde pendant cette époque ». Il s’agit notamment de mettre en œuvre une « planification participative » permettant un juste équilibre entre le marché, l’Etat et la société civile.

 

Un panorama du débat économique au sujet du développement durable, Franck Dominique Vivien, Historiens&Géographes n°387

 

Selon Ignacy Sachs, l’écodéveloppement est un développement des populations par elles mêmes, utilisant au mieux les ressources naturelles, s’adaptant à u environnement qu’elles transforment sans détruire. L’enjeu, c’est de trouver les modalités et les usages de la croissance qui rendent compatibles le progrès social et la gestion saine des ressources et du milieu. Selon lui, la croissance est un lieu d’amplification des problèmes environnementaux, mais ce n’est pas elle qui est la cause de ces problèmes. Il doit donc être possible d’inventer une croissance respectueuse de l’environnement.

 

Les cinq dimensions de la durabilité ou de l’écodéveloppement sont :

- la dimension sociale - la dimension spatiale

- la dimension économique - la dimension culturelle

- la dimension écologique

 

Tirée de : R. MARJOLET. La notion de développement durable dans les projets urbains français. DESS. Amen. & urb. IFU.  Univ. Paris 8. 2004/05. en  p.13       

 

On préféra à la notion d’écodeveloppement, la notion glauque et floue de développement durable.    

 

Cité dans le rapport, « our common future » Brundtland 1987 (du nom de la Première Ministre du Norvège, Gro Harlem Brundtland), le développement durable «  est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins. »

 

Son concept de base figure dans la devise : « penser globalement agir localement ».

 

Le développement durable s’appuie sur les paramètres suivants :

·        L’équité sociale, qui préconise une solidarité Nord/Sud, tout en préservant les intérêts des générations futures ;

·        Le principe de précaution et de prudence envers l’exploitation des ressources naturelles et les impacts sur l’environnement ;

·        La gouvernance, basée sur la dynamique d’actions incluant l’éthique, la démocratie, la citoyenneté, le partage et la solidarité.

 

 1992, Sommet de la Terre de Rio de Janeiro, débouche sur une Déclaration (de Rio) de 27 principes et sur un programme d’action pour le XXI e S. (Agenda 21).

 

AGENDA 21 ?

Le Chapitre 28 du Programme issu du Sommet de Rio, préconisait aux collectivités locales de se munir d’un Agenda 21 local. Ce dernier s’oriente sur :

·        Le développement social et économique, pour lutter contre la pauvreté, les modes de consommation, la santé, la démographie….

·        La conservation des ressources naturelles, l’eau, l’air, les écosystèmes, les montagnes, les mers, les océans, la gestion des déchets…

·        Le renforcement du rôle des associations, des femmes, des jeunes, des acteurs sociaux et des collectivités locales.

·        L’appui aux moyens d’actions : l’éducation, la recherche, le financement, la technologie…

 

LES ETAPES DE CONSTRUCTION DE L’AGENDA 21 LOCAL :

 

DIAGNOSTIC

STRATEGIE POLITIQUE

PROGRAMME D’ACTIONS

EVALUATION

 

  • Ce qui ne va pas dans le territoire ;
  • Ce que les habitants espèrent 
  • Perceptions des habitants
  • Concertations entre habitants et acteurs locaux (communes, entreprises, administrations

 

Le territoire envisagé dans le futur proche, contribuant au développement durable.

Thèmes retenus.

Objectifs fixés.

 

Les élus locaux s’engagent à promouvoir les attentes publiques.

 

Les habitants sont impliqués ;

Information, concertation, consultation.

Définition des actions.

Partenaires, Budgets, délais

 

Travail de concertation (transversal), services des collectivités et acteurs du territoire.

Mise en place d’une organisation évaluation et suivi.

 

Diffusion de l’information de l’Agenda 21. 

Périodique, pour réajuster le programme d’action.

Mode de déroulement des actions,

Résultats attendus et atteints

 

L’évaluation implique les bénéficiaires.

 

Mise à jour de l’Agenda 21

 

 

1997, le Protocole de Kyoto : définit des objectifs de délimitation et de réduction des émissions de gaz (au nombres de 6) à effet de serre pour les pays  développés.

 

2002, Johannesburg, Sommet mondial sur le développement durable. Nouvelle déclaration, après un bilan décennal mitigé :

  • Réduction de moitié du nombre de personnes privées d’accès à l’eau potable et à l’assainissement ;
  • Accroissement de l’usage des sources d’énergies renouvelables dans la production énergétique ;
  • Création d’un fond de solidarité mondial de lutte contre la pauvreté ;
  • Amélioration des performances écologiques et sociales des systèmes industriels ;
  • Aide aux pratiques agricoles écologiquement viables ;
  • Développement des connaissances sur les relations santé/environnement.

 

Décembre 2007, la Conférence de Bali, sensée définir quantitativement les émissions de gaz à effet de serre, a buté sur la « résistance » des Etats-Unis, le Canada, l’Australie et le Japon. La « feuille de route » s’est déclarée pour la lutte contre la déforestation. Ainsi, les pays forestiers (Brésil, Congo), peuvent bénéficier d’une rémunération pour la préservation de leur patrimoine forestier, principal « absorbant » du dioxyde de Carbone.

 

En conclusion, même si le DD se décline sous ses aspects impérativement « humanistes », il rencontre des réactions récalcitrantes.  Aussi, ne faut-il pas voir dans ces réactions des attitudes conduisant à des luttes inégales ?

 

Quelques facettes du DD.

 

Examinons à présent la nature de cette option de développement.

 

Développement durable et croissance ?

 

Développement et croissance émanent tous les deux de la biologie. Si le premier renvoie à un « saut » qualitatif, par rapport à un état précédent, le second définit plutôt des aspects quantifiables. Mais, tout développement ou croissance ne nécessitent-ils pas une « consommation » de ressources premières ? Et puis les écosystèmes hérités, ne sont-ils pas des phases historiques (ré) actualisées) par des générations successives ?

 

C’est méconnaître le principe d’entropie que de ne pas considérer les « dégradations » consécutives à un processus de production. Cette « perte », n’est-elle pas suivie d’une  « valeur d’usage », utile pour améliorer des conditions vitales?

 

Concernant, la durabilité, c’est une des caractéristiques du développement, autrement la stagnation prendra le sens d’un dépérissement progressif tendant à l’anéantissement final.

C’est dire que développement durable est un pléonasme. (M.Cote).

 

 Les attitudes ? 

Deux attitudes se font face. Elles se déclinent sous formes de stratégies de mise en œuvre de politiques du développement durable. La première, estime que l’utilisation des ressources est légitimée par ses aspirations des générations présentes. Son approche s’appuie sur une mise à profit des ressources naturelles (énergies fossiles, minerais..), moyens par lesquels le développement techniques permettra de mettre en place des modes d’exploitation d’autres ressources « non agressives » sur le plan environnementale.

 

L’autre attitude faisant prévaloir l’entropisme,  considère que l’on doit en aucun cas substituer les ressources artificielles aux ressources naturelles. Ce courant va jusqu’à conjecturer l’apparition de phénomènes irréversibles.

 

Malgré les modes préconisés pour la mise en œuvre des principes du développement durable, les actions demeurent « imprécises ». Car les deux attitudes sont utilisées alternativement.

 

Enfin, sur le plan d’équité sociale, prise à une échelle mondiale, les recommandations du développement durable semblent oublier que l’état des lieux de la planète est du majoritairement à la surexploitation des ressources par les multinationales. D’autres parts les pays du Nord, avaient durant cette mise à profit des ressources, construit une « machine » productives et des systèmes d’organisation sociale pouvant facilement adapter les principes de mise en œuvre de développement durable.

 

C’est également reconnaître que les systèmes « précoloniaux » d’organisation sociale, se présentaient comme des « totalités ». Autarciques, ces modes assuraient un relatif équilibre économique, social et environnemental. Car, la colonisation a employé tous les modes juridiques, déracinement, mécanisation, salaires pour venir à bout de ces sociétés dites fermées. Une fois l’équilibre « cassé », les modes de dépendance s’étaient installés, allant du « langage », du comportement, de l’architecture aux manières de voir l’avenir….     

 

L’urbanisme dessine également un grand point d’interrogation face aux recommandations du développement durable.    


A.BOUCHAREB 
dec.2007

  
Pour citer  la source:
A.Bouchareb, Cours  n° 3.  le DD, une panacée ?. Post-graduation. Mod. Urbanisme et environnement. DAU. Univ. Mentouri. Constantine. 2007/2008. 7 p.

 

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M
Sincèrement bravo, j'apprécie cette méthode pédagogique. En lisant seul, nous avons tendance à mieux analyser et synthétiser, ce qui ne peut être que plus enrichissant à un débat constructif aux heures de cours.
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B
Merci. N'hésitez pas à indiquer vos préoccupations sur le thème.