COURS N°4: Urbanisme et environnement

Publié le par bouchareb

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 Ph. A.BOUCHAREB 2006


La culture est la principale forme d’anthropisation actuellement. Cette dernière regroupe toutes les actions de l’homme sur l’environnement. Elle se compose généralement d’action de prélèvement (minerai, matériaux de construction…), d’artificialisation (bétonnage, dallage…) et d’aménagement (urbanisation).
 
L’interface de ce rapport constitue le paysage. Ce dernier constitue un intérêt thématique pour plusieurs disciplines scientifiques. La géographie, la géologie, l’agronomie, l’architecture, l’archéologie l’étudient pour sa « formation » comme un héritage, alors que l’esthétique, l’histoire et la culture y voient les modes de représentation.  
 
L’autre forme proche du rapport urbanisme/environnement, développée par des géographes anciens et revalorisée par A.Berque particulièrement, est le concept d’oecoumène. Du grec oikos, signifiant « habiter », le concept renvoie à l’humanité rattachée à la « terre », comme unique espace de sa vie et de son évolution.
 
Enfin, tout établissement humain (depuis le néolithique) suppose une certaine exploitation de l’environnement, avec un lot différencié de dégradation.
 
Ainsi, l’urbanisme comme discipline ayant pour but, la planification et la réalisation de l’établissement humain, ne peut pas ignorer l’échelle environnementale, tant ce dernier constitue le champs sensible à la production « matériel » de cette « œuvre».
 
La ville et l’entropie.
 
Les établissements humains en général se fondent sur la présence de certains déterminants et faits physiques et géographiques.
 
  • Géologiques, certaines villes n’ont été créées que par rapport à une exploitation d’un sous-sol riche en minerai ou en énergie fossile. Cependant, ces ressources « épuisées», la problématique de l’avenir de ces établissements se pose avec une grande acuité. D’autre part, la tectonique reste un facteur essentiel pour l’établissement humain, tant la durabilité d’une ville reste tributaire des solutions techniques. Les glissements de terrains, les séismes restent de grands « risques » pour le maintien d’une viabilité permanente.        
  • Morphologiques, certaines villes anciennes ont été implantées sur des sites facilitant leur défense. Avec le temps, ces sites deviennent désuets, occasionnant d’importantes difficultés pour leur intégration dans les évolutions urbaines. Le cas de la vieille-ville de Constantine, se double par le fait qu’elle est le centre « économique » de la ville. Cette situation conduit généralement à l’abandon ou à la muséification.
  • Climatiques, inconvénients et avantages, ils influencent les modes d’établissements humains. En recherchant, la fraîcheur ou la chaleur, les villes s’exposent volontairement pour capter un maximum de vents frais ou de rayons solaires. Cependant, la plus grande préoccupation par rapport aux climats est prise à des échelles réduites (quartiers, habitations).
  • Hydrologiques, le voisinage des cours d’eaux, des sources et des lacs a été préféré pour l’établissement humain. Tirant profit de ces ressources, (vitales, économiques), l’homme s’expose également aux inondations et aux crues. Les eaux souterraines sont également un « atout » fondamental, tant les quantités vouées à l’alimentation pour des besoins domestiques constituent un facteur d’hygiène et d’évolution important.
  • Végétation, la présence d’un couvert végétal, (ou d’un bon sol) permettra d’envisager des mises en valeurs pour augmenter les ressources utiles pour envisager un développement adéquat. Comme, il sera facile d’aménager des parcs « naturels » utiles aux habitants.
 
Remarquons, que ces paramètres avaient donné une matière première pour mettre en place la sitologie, science dont l’objectif vise l’évaluation de l’impact des faits physiques sur la fondation et l’évolution des villes. Cette discipline s’est acoquinée à l’urbanisme en établissant les caractéristiques propres à chaque lieu et à son éventuel contenu.
 
D’autres parts, les sites à valeurs défensifs ou les sites géologiquement à « faible » portance ne sont plus d’actualité. Les systèmes de défenses se sont fortement développés, alors que techniquement, la construction s’appuie sur des solutions plus performantes, au point ou le « dallage » des plans d’eau offre des sites artificiels bien « portants ».
 
La ville, depuis sa fondation ne peut être qu’un facteur d’entropie ; une nécessité pour satisfaire ses habitants.
 
La climatologie urbaine démontre qu’en milieu urbain, les conditions sont toujours en deçà des « normes ». Le rayonnement solaire direct est atténué par les particules issues de la pollution. L’humidité en baisse, les surfaces « bâties » favorisent la convection…La ville influence la vitesse du vent par la rugosité des « façades ». 
 
Les extensions se calquent également sur l’effet de mode. La rurbanisation, l’étalement urbain, en plus qu’elle enserrent des espaces « agraires », si l’urbanisation ne les a pas effacés, elles occasionnent cette mobilité que a tendance rendre les territoires si proches, mais dont le trafic favorise la pollution de l’air et produit les nuisances sonores.
 
Les modes de gestion urbaine, commandent également une performance technique et réglementaire adaptées. La gestion des déchets « ménagers » constitue un indicateur de son efficacité. Alliant, logistiques, modes et « imaginations », cette mesure est d’autant plus importante qu’elle est quotidienne.
 
Les ressources sont également appelées à accompagner l’évolution « démographique » et technologique. Le cas des ressources « épuisables » et périssables pose le problème des modes de consommation qui relèvent surtout d’une conscience citoyenne et de la sensibilisation. 
 
Autant affirmer que la ville, telle que nous la vivons aujourd’hui, ne montre pas assez ses «effets dégradateurs ». Elle se dessine comme un organisme vivant, qui a besoin de ressources renouvelées, qui doit « se soulager » de ses déchets, qui doit penser à trouver des espaces pour ses protubérances…voulues ou non…
 
Le Développement durable n’a rien prôné pour l’urbanisme…..
Et pourtant il y a, comme toujours, des scientifiques tellement « branchés », qu’ils inventent rapidement le concept pour annoncer la couleur : la ville durable.
 
 
 
L’urbanisme, entrée dans le dd.
 
En 1994 à Aalborg, les villes européennes lancent leur Charte, des villes et des territoires durables. Les représentants de 80 villes, s’engagent dans ce cadre d’élaborer l’Agenda 21.
 
L’essentiel du contenu de la Charte s’appuie sur :
 
  • Politiques cohérentes et intégrées basées sur une vision long terme partagée,
  • Prise de décision par la démocratie participative,
  • Préserver et protéger les biens publics et communs
  • Promouvoir et accélérer la transition vers des modes de consommation durable
  • Planifier et développer des aires urbaines pour le bénéfice de tous
  • Méthode durable de construction et de gestion des bâtiments.
  • Choix existants de mobilité durable,
  • Préserver la santé des habitants des zones urbaines,
  • Créer des économies locales conciliant emploi et préservation de l’environnement,
  • Garantir l’existence de communautés stables et supportrices (équité et justice sociale),
  • Management, suivi et évaluation des politiques urbaines,
  • Contribuer à une amélioration globale des conditions de vie et de l’environnement sur la planète.
 
A partir de cette Charte, et les recommandations de l’Agenda 21, la mise en œuvre d’une démarche d’urbanisme est appelée à respecter certains principes issus rapport du développement durable :
 
  1. Approche pluridisciplinaire et transversale permettant d’intégrer les trois piliers du développement durable (économie, social, environnement).
  2. Gestion transparente de l’information, avec une concertation entre tous les acteurs impliqués (bénéficiaires, décideurs, financiers, riverains).
  3. Démarche progressive et itérative, en continuelle mise à jour après des phases d’évaluation critique allant jusqu’à réorienter le projet.
  4. Vision globale du projet permettant d’assurer une cohérence entre les différentes échelles (territoire, intercommunalité, régional…)
  5. Projection à long terme, appuyée par des études prospectives et des prévisions (adaptabilité, réversibilité, évolutivité…).
 
Le projet urbain en lui-même voit sa portée se mêler aux objectifs du développement durable. Ainsi ses modes d’élaborations doivent veiller à respecter :
1.      la consommation des espaces naturels,
2.      les impacts sur l’environnement,
3.      la qualité des espaces et des ouvrages,
4.      la prise en considération des différents usagers,
5.      la mixité fonctionnelle et sociale,
6.      la prise en compte des coûts d’investissements et de fonctionnement.
 
La mise en route des projets :
 
Les projets conçus dans le cadre de développement durable doivent mettre en places des méthodes, des démarches, des outils et des actions. Le principe de précaution commande une la formulation de projets cohérents, progressifs et surtout gérables avec des « haltes » évaluatives.
 
Cependant, la performance des résultats reste tributaire des « références » de bases. Ces dernières font l’objet d’une construction méthodique. C’est le cas des indicateurs du développement durable.
 
Les indicateurs du développement durable
 
Un indicateur, utilisé en sociologie, il désigne une traduction d’un concept théorique en concept observable. C’est une variable observable pour rendre compte d’une réalité non observable.
 
Il est également formé de plusieurs descripteurs, ces derniers sont des notions (quantifiées) pour décrire un état ou une situation.
 
Exemple : la quantité de déchet produite /habitants/an est un descripteur. Comparé aux années précédentes, il permet d’évaluer la tendance de la consommation et des rejets des déchets, il devient alors indicateur.
 
La nécessité de ces indicateurs permet :
  • une meilleure programmation de la gestion urbaine,    
  • définition d’une politique et des priorités environnementales,
  • d’évaluer les actions initiées.
 
Ainsi, l’Institut de l’Aménagement, d’urbanisme et de la Région Ile de France (IAURIF), a établi les indicateurs suivants :
 
Environnemental :   
Biodiversité, déforestation, protection des espaces naturels, exploitation durable des ressources, dégradation des sols, artificialisation de l’espace, pollution des sols, agriculture biologique,  Emission, des GES et réchauffement climatique, pollution atmosphérique globale, atmosphérique locale, bruit, disponibilité de l’eau douce, accès à l’eau potable, des eaux douces, pollution marine, de consommation d’énergie, énergies renouvelables, limitation de production des déchets, modes de transport doux et place des transports, Achats verts, management environnemental.
 
Social
Paix et ordre, alimentation, liberté de gestion des affaires publiques, santé, richesse des ménages, travail forcé, travail (smig), hygiène et sécurité, travail des enfants, éducation, culture, égalité des ménages, égalité des sexes.
 
Economique,
Chômage, pauvreté, déficit public, dette extérieure, dette publique, inflation, taille de l’économie, vie et mort des entreprises, économies parallèles.
 
L’OCDE, de son côté définit d’autres indicateurs classés dans trois catégories :
 
 
 
Etat : correspondant à la qualité environnementale en un lieu et en un moment donné. Cet ensemble d’indicateurs, décrit la sensibilité les aléas et qualité de l’environnement. 
Cette catégorie regroupe :
L’utilisation du sol, la qualité des eaux superficielles, les sols contaminés, la dette extérieure, l’espérance de vie des habitants (moyenne).
 
Pressions : les indicateurs de cette catégorie rendent compte des effets subis par l’environnement. Les émissions de gaz toxiques, les impacts et les risques encourus.
Les indicateurs sont :
Le PIB (produit individuel brut), les émissions de GES, captage des eaux souterraines et superficielles, consommation/utilisation des pesticides dans l’agriculture, production et destination finale des boues issues des épurations des eaux résiduelles.
 
Réponse : ces indicateurs évaluent les attitudes de la société vis-à-vis l’environnement. Ils rendent compte de l’adhésion sociale aux projets, de la dynamique en faveur des actions, la participation et l’implication des acteurs.  
Les indicateurs sont :
Les investissements et les dépenses pour la préservation de l’environnement et de l’eau potable, la réutilisation des eaux résiduelles traitées, les mesures initiées pour réduire les nuisances sonores, les dépenses pour la santé, l’éducation et la protection sociale, les dépenses pour la recherche et le développement. 

Les instruments et documents d’urbanisme

 
Le droit d’environnement généralement absent des constitutions, est devenu un cadre nécessaire la protection des intérêts des sociétés. Les infractions qui peuvent nuire à la qualité de la vie ne sont pas « incriminées » et pourtant la responsabilité est facilement déterminée. D’autre part le droit d’urbanisme doit également ajuster ses attendus par rapport à celui de l’environnement pour créer un cadre cohérent susceptible de déterminer les modalités de préservation environnementale.
C’est dans ces cadres législatifs majeurs, que les instruments doivent être élaborés. La production urbanistique est soumise à la planification, elle n’est qu’un « échelon » de l’aménagement du territoire. Cependant l’urbanisme est soumis à des instruments régulateurs, réglementaires et d’orientations.
 
A ce stade, en France (en Algérie) également, le SCOT a fait son apparition le 13 décembre 2000 dans le cadre de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU). Le Schéma de Cohérence Territoriale devient le principal outil d’aménagement à l’échelle des intercommunalités.
 
Définissant les grandes orientations en tant que document stratégique, il vise à assurer une développement cohérent des territoires en se basant sur les trois piliers du développement durable.
 
Donc ses principes de bases sont :
  1. la préservation du capital naturel, agricole et paysager,
  2. promouvoir la proximité et l’accessibilité à tous, en fondant des liens de solidarité et assurant l’efficacité des services (déplacements…)
  3. Intensifier le développement en réduisant le « gaspillage » de l’espace.
 
Cette stratégie tend la coordination entre les plans de déplacements urbains (PDU), les programmes locaux de l’habitat (PLH) et les Plans locaux d’urbanisme (PLU).
 
Comme ces outils ne sont pas suffisants pour aboutir à des résultats viables, des organismes européens développèrent des « démarches » labellisées pour la construction des bâtiments pour favoriser les réductions de consommations énergétiques.
 
Les allemands fondateurs « modernes » de l’écologie politique, développèrent la qualité environnementale par l’introduction des labels de l’Habitat à basse énergie, et Habitat passif, basés sur la réglementation thermique. Des bio-hauser (pour allergiques) et l’habitat économe sont devenus des produits solvables dans le marché de l’écologie. Précisons que le programme scolaire allemand a intégré le DD dans ses registre il y a 3 décennies.
 
Les Vorarlberger Baukünster, constitué par des jeunes « marginaux » autrichiens, malgré la contestation de l’ordre des architectes, a par son pragmatisme convaincu les « consommateurs ». Artisanat et produits industriels marque cette architecture économisante du foncier et de l’énergie. Seule, leur philosophie est plus que captivante : «  le simple n’est pas toujours le mieux, mais le mieux est toujours simple ».
 
 Le Breeam (Building Research Establishment Environmental Assessment Method).  anglais, lancé par le British Research Establishment, est une grille d’évaluation des bâtiments. Avec ses multicritères, les édifices sont notés à partir d’un ensemble d’index quantifiés, santé et bien-être, énergie, émission de CO2, transports, pollution. L’évaluation (nombre de points) renvoie à des appréciations allant du passable à l’excellent.
 
Le HQE français, se veut une démarche impliquant divers profils, elle tend vers l’aboutissement à une qualité de confort relative à la construction. La méthode concerne 14 « cibles » exigentielles, classées en « écoconstruction », écogestion, confort, santé.
 
 
Concernant la ville durable…
 

Ce nouveau concept semble se développer rapidement à la traîne des débats sur le DD.
La ville est plus ancienne que le DD, …Nous pensons qu’elle a été crée tacitement pour durer et surtout dans un esprit ou l’environnement était respecté, sacré et que tout « écart » était blasphématoire…qu’il expliquait les colères divines.
Nous avons encore en mémoire les souvenirs de villes et surtout de villages totalement issus de la nature (à commencer par leur matériaux), respectueux d’un ordre écologique, vivant dans un rythme cyclique…tout était géré par les coutumes et le savoir « paysan » contribuait pleinement comme registre à proposer des solutions issues d’expériences séculaires. C’étaient les seuls exemples que nous connaissons (que nous avions connu) qui traduisent ces invitations qui insistent pour que l’on se prosterne pour « dame nature »…
 
Maintenant que l’on doit définir la « ville durable », référons-nous à son auteur dont voici des extraits.
 
1.       C'est une ville capable de se maintenir dans le temps, de garder une identité, un sens collectif, un dynamisme à long terme. Pour se projeter dans l'avenir, la ville a besoin de tout son passé, d'une distance critique par rapport au présent, de sa mémoire, de son patrimoine, de sa diversité culturelle intrinsèque et de projets multidimensionnels.  
2.      La ville durable doit pouvoir offrir une qualité de vie en tous lieux et des différentiels moins forts entre les cadres de vie. Cette exigence appelle une mixité sociale et fonctionnelle, ou, à défaut, des stratégies pour favoriser l'expression de nouvelles proximités : commerces et services de proximité, nature et loisirs de proximité, démocratie de proximité, proximités aussi entre les différentes cultures de la ville, entre les groupes sociaux, entre les générations. Cela oblige à penser différemment des catégories longtemps étanches, des couples apparemment irréconciliables, pour ouvrir la voie par exemple aux parcs naturels urbains, à la ruralité en ville, aux schémas piétonniers d'agglomération, à l'économie solidaire et aux finances éthiques, ou plus simplement à la démocratie locale et globale à la fois.
3.       Une ville durable est, en conséquence, une ville qui se réapproprie un projet politique et collectif, renvoyant à grands traits au programme défini par l'Agenda pour le XXI° siècle (Agenda 21) adopté lors de la Conférence de Rio, il y a dix ans. Les villes qui entrent en résonance avec ces préoccupations définissent, à l'échelon local, quelles formes donner à la recherche d'un développement équitable sur un plan écologique et social, vis-à-vis de leur territoire et de l'ensemble de la planète, et elles reformulent par là même un sens collectif. Il s'agit à la fois de réduire les inégalités sociales et les dégradations écologiques, en considérant les impacts du développement urbain à différentes échelles. La "durabilité" dont l'horizon serait seulement local n'a pas de sens en termes de développement durable, caractérisé par le souci des générations présentes et futures, du local et du global. Il s'agit en somme de trouver des solutions acceptables pour les deux parties, ou encore, de ne pas exporter les coûts du développement urbain sur d'autres populations, générations, ou sur les écosystèmes.
 
Extrait d’un article de
Cyria Emelianoff     Comment définir une ville durable
Consultable sur le site
http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/agenda21/intro/emelia.htm

Pour citer  la source:
A.Bouchareb, Cours  n° 4.  Urbanisme et environnement. Post-graduation. Mod. Urbanisme et environnement. DAU. Univ. Mentouri. Constantine. 2007/2008. 7 p.

 
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